À l’ère de l’intelligence artificielle, des fake news et des vérités alternatives, la vigilance reste de mise.
Un article intitulé « Le Burundi : est-il encore gouverné… ou simplement occupé ? Quand l’incompétence devient système », et signé par un certain Marc Delmotte, prétendu “envoyé spécial” au Burundi pour le journal belge Le Soir, fait le « buzz » sur les réseaux sociaux.
L’article se présente comme le témoignage d’un journaliste ayant parcouru le Burundi pendant deux semaines. Marc Delmotte y raconte « ce qu’il a vu, entendu et compris loin des discours officiels », notamment une jeunesse « résignée » et une administration « désarticulée ». Le récit est certes bien écrit et reflète des réalités connues.
Cependant, d’un point de vue journalistique, j’ai été interpellé par l’absence d’éléments concrets. Il manquait cette authenticité caractéristique d’un véritable reportage de terrain. Ainsi, l’auteur ne précise à aucun moment les endroits qu’il a visités au Burundi.
Intrigué, j’ai contacté, Philippe De Boeck, du service international au journal Le Soir, que j’ai bien connu au Burundi. La réponse est sans équivoque : « Nous ne connaissons pas Marc Delmotte qui n’est donc pas envoyé spécial du Soir au Burundi. C’est clairement un faux et une usurpation d’identité ».
En journalisme, cette pratique porte un nom : le « bidonnage ». Il s’agit de fabriquer, falsifier ou arranger des informations pour créer un reportage plus attrayant ou sensationnel, au détriment de la vérité factuelle.
La conclusion s’impose : Marc Delmotte est un personnage fictif qui ne s’est jamais rendu au Burundi. Que la situation décrite corresponde à certaines réalités est une autre question. Mais affirmer qu’il s’agit d’un “reportage” constitue une imposture journalistique qu’il convient de dénoncer.
À l’ère numérique, distinguer le vrai du faux devient un art que chaque citoyen doit cultiver. Car le véritable antidote contre la désinformation reste la vigilance collective et le sens critique individuel.
Ce cas nous rappelle que même quand un récit « sonne juste », la méthode employée pour le produire reste fondamentale.
La vérité mérite mieux que des raccourcis, même bien intentionnés…
On peut bien sûr débattre de la méthode employée par celui qui se cache derrière le pseudonyme Marc Delmotte, mais je ne peux m’empêcher d’admirer cette audace qui, à mon sens, bouscule les grands médias spécialisés dans la région des Grands Lacs. Certes, il a franchi certaines lignes rouges du journalisme. Mais, dans le pire des cas, je vois en lui une sorte de Robin des Bois de l’information, dérobant aux médias classiques des titres qu’ils n’utilisent plus pour éclairer le public, préférant les mettre au service d’intérêts politiciens.
Il aura au moins eu le mérite de désigner des réalités que beaucoup ne veulent plus voir et de nommer les choses telles qu’elles sont.
Pretendu reportage mais réel.