À l'époque du stade FFB, lors des grands matchs, les organisateurs avaient une tradition bien particulière : à environ dix minutes de la fin, ils ouvraient grand les portes aux jeunes des cités désargentés, aux chômeurs, bref à tous les laissés-pour-compte. Histoire de leur permettre de goûter un peu à l'ambiance, de saisir les dernières miettes du spectacle.
Je ne sais pas si c'était par humour, courtoisie, ou ironie, mais ce moment était baptisé « isaha ya ba patrons » (l'heure des patrons). Les plus anciens s'en souviennent encore, j’imagine.
Quand j'ai entendu le Président de la République déclarer que la vie d’un pays ne se limite pas aux postes politiques, qu’il a besoin de tout le monde et qu’il n’oubliera personne, ce souvenir de jeunesse m'est revenu en mémoire. En d’autres mots, les opposants seront invités à accéder à des postes « non politiques ».
Passons naturellement sur la condescendance présidentielle d'une telle proposition. Celle-ci semble accréditer l'idée que les opposants ne seraient bons qu'à occuper des postes « non politiques » – les postes importants, les postes politiques notamment, étant naturellement réservés aux membres de son parti. Les partisans de l'inclusion apprécieront la délicate attention du père de la nation. Quel beau geste d'ouverture : « Venez donc, mais dans les places réservées ! »
Au stade FFB, quand sonnait l'heure des patrons, on assistait immanquablement à une cohue mémorable, à de grandes bousculades pour franchir les portes enfin ouvertes. Chacun se ruait pour attraper sa part de spectacle, même tardive, même dérisoire.
Allons vivre la fin du spectacle …
Question: la vie d’un pays ne se limite pas à la politique. C’est vrai. La figuration aussi a son importance. Et vous, seriez-vous prêt à jouer les figurants… pourvu qu’on vous laisse entrer dans le stade ?
On disait aussi : Saa za bishomeri ou saa z'aba boss aussi... :-). Ah, l'humour noire des Burundais!!